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LA
FORÊT DE BAÏNEM
Alger
moderne s'est étendu du côté de Mustapha ; la ville
a déchiré ce burnous blanc étalé dans la verdure
à quoi la comparaient les poètes arabes ; elle monte à
l'assaut des coteaux et s'allonge sur le littoral jusqu'à Hussein-Dey
qu'elle englobera, comme elle a englobé l'Agha.
Aussi, à ces itinéraires toujours très attrayants
mais désormais trop fréquentés et envahis par les
constructions nouvelles : Télemly, ColonneVoirol, Boulevard Bru,
Birmandreïs, El-Biar, etc.. les amateurs de longues promenades préfèrent-ils
les environs opposés d'Alger qui leur offrent des chemins tout
aussi pittoresques en leur laissant l'impression de se trouver en pleine
campagne. De ce côté de la ville, libre à eux, selon
leur fantaisie, de couper à travers champs, de suivre la crête
d'une colline pierreuse, ou le sentier qui zigzague le long d'un petit
ruisseau. L'un de ces derniers chemins et l'un des plus pittoresques aussi
est celui qui traverse la forêt de Baïnem laquelle a été
récemment encore dévastée par un incendie. Et, c'est
pour nous rendre compte des dégâts causés et présenter
ces photographies à nos lecteurs que nous venons de refaire cette
promenade bien connue.
Partis par la vallée de la Skakena, qui remonte à partir
de Bab-el-Oued, une route à lacets, nous atteignîmes Bouzaréah,
un des plus jolis villages, sans nul doute, des environs d'Alger. Ce point
culminant du Sahel commande une admirable vue sur toutes les collines
voisines, sur les ravins dégringolant vers la mer, sur la grande
plaine et l'Atlas.
Le village dépassé, voici la roule tracée à
même une terre rougeâtre qui serpente entre des touffes de
ronces et de lentisques. On chemine à travers une lande étrange
développée sur une large croupe dénudée. De
chaque côté, un panorama splendide se déroule à
perte de vue ; au sud : la Mitidja jusqu'au Zaccar ; au nord : la mer.
Quelques fourrés, les premiers peuplements qui deviennent vite
assez denses et maintenant les eucalyptus, les pins d'Alep, les chênes-liège
nous entourent.
A la vérité, pour être presque régulièrement
incendiée chaque année, et nos photographies permettent
de juger des derniers ravages, cette forêt reste quelque peu clairsemée.
Tous les moyens d'action ne sauraient, en effet, empêcher que ces
arbres et ces fourrés, comme d'une façon générale,
tous les boisements algériens ne fussent, pendant la longue saison
des chaleurs et de la sécheresse, un champ tout préparé
pour l'incendie, un milieu où la moindre étincelle suffit
à déchaîner l'élément dévastateur.
Mais, à défaut de grands arbres, cette forêt de Baïnem
est, au printemps, couverte de fleurs : cyclamens aux pétales rose
pâle, bruyères, lavandes, etc.. et c'est son principal charme
avec ses échappées de vues merveilleuses.
Par des éclaircies ouvertes sur le versant on aperçoit -
miniatures aux aspects irréels - Guyotville, le village de la Pointe
Pescade. le hameau des Bains Romains, au loin à nouveau et toujours
la mer.
On descend ensuite par la roule carrossable, sur les Bains Romains, ou
bien si l'on ne craint pas les pentes trop roides, par les ravins broussailleux
qui viennent aboutir au littoral du côté de Saint-Eugène.
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