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APRÈS
AVOIR VISITÉ
LE CENTRE DE TRANSFUSION SANGUINE
ET LES HOPITAUX
MM. CATOIRE ET NAEGELEN
ont inauguré à Ben-Aknoun le Centre familial
de vacances
« Il
n'y a pas de problème algérien il n'y a que des problèmes
humains en Algérie » a déclaré M. Jacques
Chevallier
Vingt-quatre heures après son arrivée à Alger, M.
Jules Catoire, secrétaire dÉtat à la Santé
publique et à la Population, a déjà pu apprécier
les progrès réalisés en Algérie dans tous
les domaines et particulièrement sur le plan social, en moins de
15 ans, cest-à-dire depuis son dernier passage.
Après la visite des diverses installations sanitaires, dont le
Centre de transfusion sanguine de la Trappe et le Centre familial de vacances
de Ben-Aknoun qui est un établissement unique en France et dans
les territoires d'outre-mer, M. Catoire n'a pas caché son agréable
surprise et aussi sa foi profonde dans l'avenir du pays.
La plus importante manifestation de la journée a eu lieu au Centre
familial de vacances de Ben-Aknoun. Elle a donné, aux organisateurs
et à leurs invités, l'occasion de rendre un vibrant et légitime
hommage à la famille et plus particulièrement a la mère
de famille.
L'arrivée à Ben-Aknoun
A 11 heures. M. le ministre Naegelen, gouverneur général
de lAlgérie. et M. Jules Catoire ont été
accueillis par MM. Jacques Chevallier, député d'Alger, président,
et les membres du conseil d'administration de la C.I.C.A.F.D.A. (Caisse
des allocations familiales); M. Alexandre Chaulet, directeur ; les élus
et les hautes personnalités de ladministration et du monde
économique.
Après la visite des installations, qui ont déjà fait
lobjet de plusieurs reportages dans l« Écho
d'Alger », M. Chaulet a indiqué que la C.I.C.A.F.D.A.
contrôle 10 milliards de salaires sur lesquels 0,25 % seulement
sont prélevés, ce qui représente, pour la trésorerie,
une masse de 25 millions annuellement. La caisse contrôle en outre
70.000 salariés, dont 25.000 sont bénéficiaires dallocations
familiales. Il a ensuite souligné l'activité du Centre de
vacances et a mis laccent sur l'indice démographique qui
est, en Algérie, le double de la métropole, « ce
qui n'est pas extraordinaire », a dit M. Chaulet.
Un repas de plus de cent couverts a été servi à 13
heures. au restaurant familial, par le personnel de
lÉcole hôtelière.
Autour de MM. Naegelen, Catoire, Jacques Chevallier et Chaulet, nous avons
noté : MM. Fernand Chevalier, Rencurel, Bentounès Smaïl,
Bentaïeb, députés ; Borgeaud, Rogier, Muscatelli, Tamzali,
sénateurs ; Farès, président de la commission
des finances à lAssemblée algérienne, représentant
le président Flinois, ainsi que de nombreux délégués
à lAssemblée algérienne ; Lechani, Rosfelder.
Abdesselam, Michelet, conseillers de l'Union française ; Roux.
préfet d'Alger ; Torrès, président du conseil général.
et de nombreux conseillers généraux ; le président
Laquière ; Urbani, secrétaire général
du Gouvernement général de l'Algérie ; Ciosi, directeur
du cabinet civil du gouverneur ;
Bouakouir et Pinty, directeurs au Gouvernement général ;
Schiaffino, président de la Région économique ; le
président Cochard ; Gau, recteur de lAcadémie ;
Ferrando, maire d'El-Biar ; Hadj Sadok, du cabinet du gouverneur ; Prouteau,
directeur de l'OF'ALAC, etc..
.
Lécole
hôtelière
M. Elophe. président de la Fédération des hôteliers,
restaurateurs et limonadiers d'Algérie, s'est félicité
de l'heureuse rencontre de son groupement avec la CICAFDA, rencontre qui
a permis cette belle réalisation daujourdhui, juste
récompense de plusieurs années defforts.
« Grâce A MM. Jacques Chevallier, Chaulet et le conseil
d'administration de la CICAFDA, notre école a pu fonctionner, car
nos moyens n'y auraient pas suffi. »
Il a insisté ensuite sur l'utilité de cette école
et du recrutement en Algérie, qui va permettre d'éviter
la main-d'uvre étrangère dans cette industrie et de
favoriser la jeunesse algérienne qui cherche sa voie.
Il a ensuite indiqué les avantages de cette organisation pour l'extension
du tourisme en Algérie et la nécessité de créer
une chaîne hôtelière de premier ordre.
Le centre familial
de vacances
M. Chaulet a fait ensuite lhistorique du centre, en rappelant tout
d'abord le projet préparé par M. Jacques Chevallier. Le
président de la CICAFDA préconisait, le 28 septembre 1942,
un centre de vacances non seulement pour les enfants, mais pour la famille
et surtout pour la maman qui devait être débarrassée
de tous soucis.
Les buts à atteindre se résumaient ainsi :
1° la famille ne serait pas disloquée pendant le congé
;
2° le père jouirait d'un repos sain au milieu des siens ;
3° la mère de famille, souvent la sacrifiée, jouirait,
elle aussi, d'un repos complet.
Ils sont aujourdhui atteints.
Après avoir rappelé la cérémonie de la pose
de la première pierre, le 29 avril 1948, par M. le ministre Naegelen
et la visite incognito que fit récemment le gouverneur général,
M. Chaulet a donné lecture de quelques lettres qui sont de véritables
témoignages de reconnaissance.
Témoignages
de reconnaissance
« Vous avez réalisé une uvre qui, sur le
plan algérien, est merveilleuse, écrit un employeur. Vous
venez de prouver que les habitants de ce pays, quelles que soient leurs
origines, leurs opinions philosophiques et leurs classes sociales, peuvent
vivre en intelligence parfaite, je dirai mieux ; ne demandent quà.
fraterniser.
Au milieu du cahot, de légoïsme profond, de la crise,
dimmoralité inévitable qui a suivi la guerre, j'ai
eu limpression que votre initiative s'élevait pour redonner
lespoir dans lavenir divin de l'homme.
Un allocataire, M. Ycoub a écrit ceci :
« Dans le désert que figure la merveille, par l'aridité
et lâpreté, une société où le
sens social s'effrite rapidement et qu'une économie démente,
entasse, comprime impitoyablement, j'ai trouvé, pour ma part, dans
votre centre, un oasis de bonhomie et de paix. Tout cela, tous ces biens
sont les plus précieux et ce ne sont pas ceux qui comptent, se
pèsent ou se mesurent, pour le prix des congés payés ! ».
Enfin, M. Camou. chef d'une famille d'origine métropolitaine, qui,
bien que relevant de la Caisse du bâtiment, a été
admise au centre de vacances, s'est exprimé ainsi :
« Je passe, ainsi que ma famille, un séjour enchanteur,
les meilleurs jours depuis mon arrivée en Algérie. Cette
uvre est vraiment admirable et tout est impeccable ».
Le discours de M. Jacques Chevallier
Au nom du conseil d'administration de la. C.I.C.A.F.D.A., M. Jacques Chevallier
a remercié toutes les personnalités présentes et
a rappelé leffort qui a été fait depuis sept
ans pour cette réalisation :
« Vous êtes ici devant une uvre collective, a-t-il
dit. Collective cette uvre l'a été dans sa conception
dont l'initiative première revient à un salarié qui
sut la faire accepter par un patronat particulièrement soucieux
de progrès social.
Collective cette uvre lest dans sa réalisation, puisque
son financement est exclusivement et volontairement assuré par
10.000 entreprises commerciales, industrielles, les professions libérales
et tant d'autres affiliés å notre caisse, non
pas pour le bien-être de quelques privilégiés, mais
pour celui des quelque 70.000 salaries qu'elles emploient.
Collective, cette uvre lest en:fin parce que depuis quil
fonctionne, ce centre reçoit sans distinction dorigine, dopinion
nil de religion, les familles des travailleurs quelles qu'elles soient
et que nous avons tenu à ce que dans sa composition même,
le personnel qui y est affecté reflétât l'éventail
ethnique et spirituel de ce pays.
Et cet effort collectif, ce travail collectif, ce but collectif, donnent
à ce centre une âme.
Comme les individus, les uvres ne peuvent vivre quautant qu'un
esprit les inspire et plus grandes et plus belles on les désire.
plus puissant et plus profond doit être le souffle qui les anime.
os cathédrales n'ont pas dautre origine. Elles ne seraient
pas ce quelles sont si des milliers de bâtisseurs anonymes
riches ou pauvres navaient contribué à dresser leurs
pierres merveilleuses avec les mains de la foi.
NOTRE BUT : INSTAURER UNE PARFAITE JUSTICE SOCIALE
Parce qu'ils croyaient en leur uvre, parce qu'ils savaient que lintérieur
de ces dentelles de pierre et derrière des vitraux allait naître
pour beaucoup une immense espérance qui chasserait les haines et
les préjugés, les égoïsmes et les rancurs,
pour faire de l'homme ce que le créateur a voulu qu'il
fût ».
Très applaudi, lorateur a ajouté :
« Nous aussi, Messieurs, nous croyons en cette uvre-ci.
Nous aussi nous l'avons érigée avec les mains de la foi
parce que nous avons la conviction profonde que rien ne sera résolu
dans notre monde déséquilibré, que rien non plus
ne sera résolu en Algérie tant que n'aura, pas été
instaurée une parfaite justice sociale, tant que les hommes de
ce pays, riches et pauvres ne se seront pas rencontrés, rapprochés,
compris et aimés.
Et cette vision, je dirai même cette préfiguration, nous
lavons eue ici, cet été, au milieu des familles ».
Et le président Chevallier de rappeler la visite incognito du centre
faite par le gouverneur Naegelen au cours de lété
et d'ajouter :
« Mieux que n'auraient pu le faire tous les théoriciens
qui prétendent fabriquer en chambre le bonheur des peuples, ces
travailleurs algériens. dans leur simplicité, nous traçaient
la voie. Leur rassemblement nous disait : « Il n'y a pas de
problème algérien, il n'y a que des problèmes humains
en Algérie ».
Ici, comme partout ailleurs, des hommes naissent, grandissent, jouissent.
souffrent. espèrent ou désespèrent. Ici, comme partout
ailleurs, cet ensemble de joies et de tristesse, despérance
et de désespoir, s'appelle : la Vie.
NOUS SOMMES COMPTABLES DU BONHEUR DES TRAVAILLEURS
Et nous tous. chefs d'entreprises ou hommes politique qui prétendons
représenter ces travailleurs, nous sommes comptables de leur bonheur
et de leur vie devant Dieu et devant les hommes...
Malheureusement, notre siècle de machinisme et de production intensive
parait ignorer cette indispensable discipline de jugement.
Aujourdhui, on cherche plus à « produire pour
produire » que « produire pour l'homme et avec l'homme »,
pour permettre à l'homme de satisfaire non seulement ses aspirations
matérielles, mais aussi des aspirations morales légitimes.
Car l'homme est autre chose qu'une simpîe machine à produire
et à consommer. Il pense aussi : « Notre dignité
réside en la pensée », disait Pascal...
Le mérite de l'uvre que nous avons accomplie ici sera de
permettre à l'homme de reprendre conscience de sa dignité.
d'avoir la certitude qu'on la reconnaît. Cest à cette
tâche que le conseil dadministration de la C.I.C.A.F.D.A.
s'est attaché. »
Enfin, le président Chevallier a conclu en ces termes :
« Ce centre nest quune toute petite pierre blanche
sur la route infinie du progrès social quil nous reste à
parcourir. Mais la voie est tracée, engageons-nous y hardiment,
nous la verrons bientôt sélargir. Inch'A1lah ! »
M. CATOIRE
Très ému, M. Catoire a remercié les organisateurs
de cette manifestation qui a permis de prouver par des réalisations
« des sentiments d'amour et de dignité humaine auxquels
personne ne peut être indifférent ».
Il a rappelé sa solide amitié pour M. Alexandre Chaulet
avec qui il a travaillé aux questions sociales et pour M. Naegelen,
« amis de la Résistance . L'orateur a évoqué
alors la libération de Strasbourg.
Il a remercié tous les « hommes de cur »
qui ont permis aux familles de pouvoir se rassembler dans ce centre et
surtout avec la maman.
« Car la mère de famille, a-t-il ajouté, n'a
pas dheure de travail, tant ses préoccupations et ses inquiétudes
sont grandes. Elle a besoin de repos. Aussi devez-vous être félicités
pour avoir su donner ce repos auquel elle a droit plus que tout autre,
et avoir uvré dans le souci de la dignité ouvrière,
lintimité de la famille et la justice sociale. »
M. NAEGELEN
M. Naegelen a félicité les organisateurs davoir donné
à cette manifestation léclat quelle mérite
et a remercié M. Catoire d'avoir répondu à l'invitation
des dirigeants de la CICAFDA.
Après avoir évoqué, à son tour, les durs moments
de la Libération et rendu hommage à l'armée d'Afrique
et au général Leclerc, le gouverneur général
a fait état de sa récente visite incognito au centre.
Il s'est réjoui du résultat et a ajouté : « Si
ce centre n'avait servi seulement qui rapprocher des familles qui s'ignoraient
ou qui ne voulaient peut-être pas se connaître, déja
il aurait sa raison dêtre. »
Soulignant l'heureuse rencontre des dirigeants de la CICAFDA et de la
Fédération des hôteliers, M. Naegelen a évoqué
le problème du tourisme et a déclaré :
« L'Algérie doit être un grand pôle dattraction
non seulement national, mais international. car elle possède un
charme particulier que nul autre pays ne peut offrir. »
Après avoir exprimé sa gratitude à ceux qui ont voulu
procurer un peu de repos à la mère de famille, il a dit
sa joie d'inaugurer un bâtiment dont il scella la première
pierre.
« Il y a, a-t-il ajouté, trop de premières pierres
qui attendent des réalisations, mais sil y en a d'autres
à poser, nous les poserons avec la volonté daller
jusqu'à lachèvement.
Il y a trop de gens qui ignorent -- en métropole plus quici
peut-être - leffort qui a été fait dans ce pays.
Faisons le serment de faire connaître partout ce qui a été
déjà fait et de ne plus permettre de calomnier luvre
française en Algérie. Ce sera la meilleure réponse
aux détracteurs professionnels, aux ignorants et aux indifférents.
Nous irons jusqu'au bout, afin que règne le minimum de justice
et de bonheur auquel les hommes ont droit.
Puisse cette journée être le prélude d'un nouvel effort
en faveur de l'application à l'Algérie du code familial.
Les autres visites
M. Jules Catoire. accompagné de MM. Mazurelle. chef adjoint de
son cabinet ; Bingisser. sous-directeur à la Santé publique
au Gouvernement général de lAlgérie ; Lavaysse,
secrétaire général de la préfecture, a visité
le centre de transfusion sanguine de La Trappe et lusine de dessication.
Il a été reçu par MM. Henri Borgeaud, sénateur,
le professeur Benhamou et le Dr Puglièse.
Dans sa propriété, M. Borgeaud a renouvelé à
M. Cétoire ses souhaits de bienvenue et dit sa joie davoir
trouvé auprès de lui tant de compréhension.
M. Catoire, heureux d'avoir pu constater les progrès sociaux réalisés
en Algérie, a promis de se pencher avec le plus grande sollicitude
sur les problèmes concernant lAlgérie.
L'après-midi. M. Catoire a visité l'hôpital dEl-Kettar
et, dans la soirée, celui de Mustapha.
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